Interview LCI.fr - Gérard Collomb

Publié le par titof

Propos recueillis par Renaud PILA

PS - "Nous ne gagnerons pas en courant derrière Besancenot"

Gérard Collomb met en garde le PS contre un retour à "un discours d'avant 1981 qui ne prenne pas en compte les dimensions économiques dans la crise".

LCI.fr - Le Congrès du PS approche. Votre motion est-elle, selon vous, dans une bonne dynamique ?

Gérard Collomb : Nous faisons partie des motions qui feront le Congrès car nous avons privilégié les réponses de fond et Ségolène Royal a accepté que l'on ne se place pas dans la course à la présidentielle, au travers de la course au poste de premier secrétaire. Comme il faudra qu'il y ait forcément une discussion entre les différentes composantes du PS pour définir une ligne politique claire, il me semble que notre option rencontre un bon écho auprès des militants.

LCI.fr - Ce congrès doit-il, selon vous, uniquement trancher sur la ligne politique ?
 Oui, c'est essentiellement un congrès qui doit trancher la ligne. Les problèmes de personnalités sont importants mais ils ne sont pas totalement déterminants. Ainsi, lors des deux dernières élections présidentielles, nous avons perdu avec deux personnalités, Lionel Jospin et Ségolène Royal, qui ne sont pas semblables. Donc nous avons perdu car nous n'avions pas de projet politique crédible. Le PS était perçu comme incapable de projeter un projet réformiste fort, tant sur le plan social qu'écologiste, tout en étant crédible économiquement. 
LCI.fr - Premier signataire de la motion E, vous étiez discret depuis quelques temps... La Ligne claire n'est-elle pas quelque peu inaudible dans une alliance avec Ségolène Royal ?

Le retour sur le devant de la scène de Ségolène Royal s'est fait à son meeting de Bordeaux, organisé par Vincent Feltesse de la Ligne claire, et sur des thématiques qui étaient celles de la Ligne claire. Ce que l'on souhaitait, c'est que Ségolène Royal puisse parler non pas des problèmes internes au PS mais des problèmes du pays. Il est important de donner notre vision de ce qu'est la crise aujourd'hui et de ce que pourraient être les solutions du PS demain.
 
LCI.fr - Pour vous, le fait que sa candidature au poste de 1er secrétaire ne soit plus un préalable reste un point important de cette motion ?

Oui, c'est quelque chose d'important à partir du moment où l'on veut concentrer le débat et surtout la ligne politique autour de la définition d'un projet, autour d'un travail collectif de l'ensemble des militants et non pas autour de la personnalité d'un candidat. Miser uniquement sur la personnalité des candidats, c'est jouer un espèce de quitte ou double. La vraie question aujourd'hui, c'est celle de la définition du projet que nous voulons présenter aux Français. Il faut que l'on apporte une réponse collective à la crise. Sur le terrain, on sent que l'on est passé de la crise immobilière à la crise financière puis aujourd'hui à la crise économique profonde.

Mais il faut que nous évitions un double écueil : ne pas prendre en compte la profondeur des répercussions sociales de la crise. A contrario, revenir à un discours d'avant 1981 qui ne prenne pas en compte les dimensions économiques de la crise.  Faut-il une politique européenne commune en matière de financement des banques ?  Oui. Faut-il des politiques coopératives au niveau européen et mondial ?  Oui. C'est sur ce positionnement que le PS doit se situer.
 
LCI.fr - Avec la crise, redoutez-vous une certaine "gauchisation" du discours socialiste ? 

Le PS ne gagnera pas en courant après les thèses d'Olivier Besancenot mais en présentant une alternative crédible par rapport à Nicolas Sarkozy. Sur la question de la crise, beaucoup de dirigeants de PME ou de salariés sont prêts à entendre un discours du PS sur une condamnation d'une économie court-termiste guidée par la finance. Des chefs de grande entreprise disent également qu'être obligé de présenter des résultats avec un retour sur investissement à deux chiffres est contraire à un projet industriel de long terme. Si les socialistes tiennent cette ligne là, ils seront audibles.

En revanche, s'ils reprenaient des thèses inspirées de l'extrême-gauche, alors ils cesseraient d'être crédibles dans l'opinion publique, à la fois dans les milieux économiques mais également chez beaucoup de salariés qui ont à l'esprit la réalité de notre monde économique. Avec le choc de la crise, je sens bien qu'un certain nombre de militants sont prêts à entendre un discours de dénonciation du capitalisme, du type de celui des années 70 ou 80. Ce n'est pas comme cela que la gauche a pu gérer le pays quand elle était au pouvoir. La tentation de reprendre ce discours serait mortifère. 

La crise ne va pas empêcher que l'on reste dans une économie mondialisée, avec l'émergence de grands pays comme la Chine ou l'Inde, pays dont nous sommes totalement interdépendants. Revenir à un discours protectionniste, comme celui qui avait pu se développer avant 1981, serait une erreur profonde.

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Publié dans Ségolène Royal

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