«Un coup de poignard dans les engagements du Grenelle»

Publié le par titof

Trois questions à Alain Chabrolle, vice-président de la Fédération Rhône-Alpes pour la protection de la nature (la plus importante section régionale de France Nature Environnement).

François Fillon a annoncé aujourd’hui lundi l’ouverture, pour 2015, de l’A 45 entre Saint-Etienne et Lyon. Est-ce une surprise ?

Pour le moins ! C’est même un gros coup de poignard dans les engagements de l’Etat vis-à-vis du Grenelle. Les différents groupes de travail planchent encore sur la préparation de la loi-cadre, et l’on pensait qu’on resterait dans le gel annoncé de la capacité routière. Entre l’A 89, déjà engagée, et l’A 45, on a l’impression qu’on va nous faire la totale dans la région lyonnaise !

Le Premier ministre estime que le projet ne va pas contre les décisions actées durant le Grenelle. Quel est votre avis ?

Le rapport rendu récemment par les commissaires enquêteurs était certes favorable au projet dans sa conclusion, mais il comportait des réserves contradictoires émises par certains élus et associatifs. C’est d’autant plus rageant que le débat local a été de haut niveau dans la contestation du projet.
Nous avons beaucoup travaillé sur la collecte des avis et la conclusion du rapport avait de bonnes chances de riper au profit de solutions alternatives, comme l’intensification de la liaison ferrée Lyon-Saint-Etienne, moins coûteuses au final que l’A 45, dont le budget très lourd pèsera sur les collectivités locales, donc, in fine, sur le contribuable…

L’Ecole nationale des travaux publics de Vaulx-en-Velin a aussi travaillé sur le sujet en interpellant l’Etat sur les alternatives possibles.

Quelles vont être les conséquences sur le terrain ?

Cette autoroute va couper en deux des milieux naturels exceptionnels et des zones agricoles périurbaines remarquables, pour lesquelles on se bat depuis trente ans. Elle va en outre induire une urbanisation linéaire qui va à l’encontre des politiques locales, plutôt favorables à une densification de l’habitat afin d’éviter les coûts connexes. Au-delà du projet, l’absence de concertation dans cette décision va totalement à l’encontre de la gouvernance partagée prônée lors du Grenelle. Il y a matière à s’interroger sur une réelle volonté politique de changer les choses. C’est une énorme déception, qui risque de mettre en porte-à-faux nombre d’associations sur la nécessité de continuer à participer au Grenelle de manière partenariale.

Fred Dufour AFP/Archives ¦ Voitures sur autoroute en aout 2007

 

Recueillis par Catherine Levesque

Publié dans Discours et interviews

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article