La thématique du pouvoir d'achat est soudain mise en sourdine

Publié le par titof

Attendu sur les questions économiques, sur lesquelles l'ensemble des sondages montre qu'il peine à convaincre, le chef de l'Etat est apparu passablement désarmé, comme s'il avait pris la mesure des limites du volontarisme en la matière. S'il a usé d'une rhétorique bien rodée pour dénoncer les excès du capitalisme ou en appeler à la nécessité d'"aller beaucoup plus loin dans le partage des profits", M. Sarkozy est resté en retrait sur les thèmes économiques majeurs de sa campagne et de la rentrée.

Candidat, Nicolas Sarkozy voulait être "le président du pouvoir d'achat" et aller chercher la croissance "avec les dents". Huit mois après son élection, il a préféré prendre de la hauteur, tout en se défendant de vouloir s'éloigner "des problèmes de la vie quotidienne". Rappelé à ses promesses sur le pouvoir d'achat, M. Sarkozy a limité ses annonces concrètes à la proposition de "créer les conditions réglementaires et fiscales pour que la participation et l'intéressement puissent s'étendre à toutes les entreprises, même à celles qui ont moins de 50 salariés". "Je veux que le niveau même de la participation et de l'intéressement aux résultats soit fortement relevé", a précisé le chef de l'Etat, qui y voit un moyen d'"augmenter le pouvoir d'achat sans ruiner la compétitivité de nos entreprises".

Cette annonce, d'une facture très gaullienne, devrait être bien accueillie par l'UMP, qui a travaillé sur le sujet. Mais il est peu probable qu'elle aide les salariés en situation de précarité et les ménages modestes à boucler leurs fins de mois alors que la ministre de l'économie, Christine Lagarde, prévoit une inflation en hausse.

Le calendrier n'était guère favorable au président : le pouvoir d'achat a fait l'objet de deux projets de loi en six mois - le dernier n'étant pas encore voté - et les dispositifs qu'ils comportent sont soit en train de monter en charge (la détaxation des heures supplémentaires), soit encore dans les limbes.

Bien que l'économie française ait plutôt bien résisté en 2007, dans un environnement difficile, M. Sarkozy est resté discret sur les moyens de relever la croissance potentielle de la France et de gagner le fameux point de produit intérieur brut (PIB) supplémentaire. Il a confié à deux Prix Nobel d'économie, l'Indien Amartya Sen, auteur de travaux sur les inégalités et sur le développement humain, et le néokeynésien américain Joseph Stiglitz, le soin de réfléchir à un nouvel instrument de mesure de la croissance, plus qualitatif, que le produit national brut (PNB). Le sujet a beau faire débat chez les économistes, M. Sarkozy court le risque de se voir accuser de vouloir changer de thermomètre quand la fièvre (le ralentissement conjoncturel) menace. Il accrédite aussi l'idée qu'un comité d'experts, celui présidé par M. Stiglitz, chasse une commission, celle présidée par Jacques Attali, qui doit remettre le 23 janvier son rapport sur la libération de la croissance française.

Le choix de M. Stiglitz, ancien président du Conseil économique de Bill Clinton et auteur de Quand le capitalisme perd la tête (ed. LGF), est assez cohérent avec la volonté du chef de l'Etat de ne pas se laisser enfermer dans une école de pensée, et avec sa critique du capitalisme financier. "Face à la montée en puissance des fonds spéculatifs extrêmement agressifs et de fonds souverains qui n'obéissent pas seulement à des logiques économiques", M. Sarkozy a souhaité faire de la Caisse des dépôts l'outil "de défense et de promotion des intérêts économiques primordiaux de la nation".

Claire Guélaud

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