Ce qu'il faut savoir pour comprendre Clearstream

Publié le par titof

Le journaliste Eric Decouty démêle les fils d'une affaire financière puis politique qui devrait valoir à Villepin sa mise en examen.

Dernière révélation dans le volet politique de l'affaire Clearstream: Dominique de Villepin aurait lui-même intimé l'ordre au corbeau Jean-Louis Gergorin de transmettre les faux listings de comptes bancaires au juge d'instruction Renaud van Ruymbeke. Des listings sur lesquels figuraient les noms de nombreuses personnalités, qui se voyaient alors accusées de blanchir de l'argent par l'intermédiaire de Clearstream, la chambre de compensation luxembourgeoise. Parmi ces noms, celui de Nicolas Sarkozy. Chargé en 2004 par le Premier ministre de faire la lumière sur l'authenticité des listings, le général Rondot, de la DGSE (Direction générale de la sécurité extérieure), a fait cette révélation le 4 juillet dernier aux juges Jean-Marie d'Huy et Henri Pons, qui tentent d'identifier les manipulateurs et les manipulés. Les certitudes des deux magistrats vont crescendo, mais des zones d'ombre demeurent. Principaux protagonistes de l'affaire donc: Dominique de Villepin et Nicolas Sarkozy, le second soupçonnant le premier d'avoir sciemment utilisé, voire fabriqué, ces faux listings pour le faire tomber. Journaliste d'investigation au Figaro et auteur de "Un Fiasco français: histoire secrète du pôle financier" (éditions Denoël, 2006), Eric Decouty analyse les responsabilités des deux hommes.

Les regards se tournent chaque jour un peu plus vers Dominique de Villepin. Son bureau et son domicile ont d'ailleurs été perquisitionnés les 5 et 6 juillet. Mais l'ancien chef du gouvernement se défend toujours de toute implication: "A aucun moment je n'ai demandé à qui que ce soit d'enquêter sur des personnalités politiques, encore moins de les compromettre", a-t-il déclaré dans une interview accordée samedi à L'Est républicain. Avant de préciser qu'il démentait "formellement avoir pris quelque initiative que ce soit", et particulièrement "en direction du juge van Ruymbeke". Des dénégations qui ne l'empêcheront probablement pas d'être mis en examen pour "complicité de dénonciation calomnieuse", le 27 juillet, lors de sa prochaine convocation dans le bureau des juges. Le rôle joué par Nicolas Sarkozy reste également à établir. Quand l'actuel chef de l'Etat a-t-il eu vent de toute l'affaire? Aurait-il laissé l'ex-Premier ministre s'engluer dans cette affaire pour mieux le décrédibiliser? Eric Decouty explique leurs éventuelles motivations en les replaçant dans le contexte politique de l'époque: la course à l'Elysée.

Mais avant l'affaire politique, Clearstream était une affaire financière. Denis Robert, journaliste et écrivain, voit dans la chambre de compensation luxembourgeoise une machine mondiale à blanchiment. Il a développé sa thèse dans trois ouvrages: "Révélation$" en 2001, "La Boîte noire" en 2002 et "Clearstream, l'enquête" en 2006, aux éditions Les Arènes (cliquez ici pour voir le reportage que lui a consacré l'émission "Envoyé spécial"). Plus généralement, c'est aujourd'hui le fonctionnement de l'ensemble des chambres de compensation qui est mis en cause. Ces organismes financiers jouent un rôle d'intermédiaire entre les banques, afin de faciliter les transactions entre les acteurs des marchés. Les banques ne discutent pas entre elles et n'ont ainsi qu'un seul interlocuteur. Carrefour obligatoire de toutes les transactions, les chambres de compensation devraient donc afficher une transparence à toute épreuve. Or, leur opacité actuelle pose problème, selon Eric Decouty.

Mathieu Eisinger et Julien Martin pour RUE 89.com

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