L’Hercule sur la place

28 novembre 2007

Grand branle-bas aux Invalides, entre Latour-Maubourg et la Motte-Piquet, depuis que le Fourbe avait décidé que sa Rachida affronterait courageusement le suffrage universel, dans ce septième arrondissement tellement Louis-philippard qu’une pantoufle y serait élue, pourvu qu’elle fût Papiste et baptisée.

Elle était la pantoufle, et les croquants du quartier s’insurgeaient que le Fourbe leur imposât sa favorite, disant ça n’était point parce que la fée Clochette  l’avait transformée en Madame de Maintenant qu’il fallait qu’elle y crût : sur le coup de minuit, le beau carrosse se changerait en citrouille.

Pourquoi le Fourbe ne l’envoyait-il point dans ces banlieues interlopes où elle eût apporté la bonne parole sarkosienne ? Avait-elle si peur de s’y faire écharper?

On avait l’explication à l’assourdissant silence du bon docteur Kouchner, le bibelot charmant que le Fourbe exposait en vitrine, comme un beau papillon épinglé :

Sa parfaite éducation lui interdisait de parler la bouche pleine, et ayant épuisé le panier de couleuvres, il en était maintenant à ingérer des boas, en attendant les anacondas que le Fourbe lui préparait.

Il était si fringant, pourtant, le Fourbe pérorant devant les gazetiers prosternés avant son départ pour la Chine. Tant ferme et déterminé que, le lard en moins, on eût cru voir Raffarin.

Quoique à bien y regarder, le triomphe annoncé sur les lampistes ferroviaires cachât une reculade, et le lion sarkosien arborât une crinière en peau de lapin :

Pour que lesdits lampistes cessassent leur mutinerie, il avait bien fallu leur rétrocéder sous la table, en monnaie sonnante et trébuchante, ce qu’on leur prenait au grand jour.

Certes, ce n’étaient que des promesses, et ne point les tenir déclencherait la tempête qui déboucherait sur l’aventure.

Le Fourbe n’en décolérait pas ! À son retour de Chine où il était allé faire le beau, il escomptait bien faire l’Hercule sur la place qui soulève les poids de 100 Kilos, ramenant dans ses bagages des contrats mirifiques tout préparés, mais qu’il prétendrait avoir arraché tout seul, de ses petits bras musclés. 

Et voilà que les apaches des banlieues lui chabotaient son entrée triomphale.

Il leur avait pourtant agité sous le nez Madame de Maintenant, qui était son appeau attrape-mahométans.

Mais quand ils avaient réalisé que sa Rachida tirait toute la couverture à elle en se servant d’eux, et que les promesses du Fourbe valaient tout autant que les feuilles d’Automne emportées par le vent, ces sauvages délaissés avaient pris le mors aux dents et tout incendié sur leur passage, même les bibliothèques !

La Cour des Comptes avait cruellement pointé le rideau de fumée qu’il jetait sur les banlieues interlopes, promettant tout et ne tenant rien.

Elles s’embrasaient à nouveau, lui renvoyant en plein museau ses mensonges, ses manipulations et son arrogante brutalité.

Avant ces émeutes, les apaches brulaient chaque nuit plus de 120 carrosses, mais les gazetiers chaboteurs n’en parlaient jamais pour complaire à leur maître.

Il parlait de dialogue et de concertation, mais jouait l’affrontement sans lequel il n’était plus rien.

Il avait semé le vent sécuritaire, et c’était le Pays qui récoltait la tempête, avec des gendarmes que l’on fusillait comme des lapins.

Certains s’en alarmaient et rêvaient déjà de tirer dans le tas, et pas seulement sur les apaches…

Avec une grande candeur – mais était-il réellement candide ? – le sieur Martin Hirsch avait publiquement reconnu que les chiffres du chômage étaient systématiquement caviardés par le gouvernement, la moitié des RMIstes étant gommés pour ne point nuire aux statistiques sarkosiennes sur lesquelles le Fourbe se congratulait. La réalité était toute autre.

À l’exception de quelques sarkolâtres bigots, l’inquiétude montait dans le camp Papiste.

Ils subodoraient que ces passages en force appelleraient, tôt ou tard, un retour de flamme qui les rôtirait.