François Bayrou ou la confusion

Publié le par JACOBS Christophe


François Bayrou a choisi de construire sa candidature sur le « ni droite-ni gauche ». Cela a pu être justifié quand la République était menacée sous la forme d’une addition et non d’une double négation. Il s’agit alors de situations d’urgence nationale. Et la Résistance avec les gouvernements de la Libération en ont été les exemples emblématiques. Mais le ni droite, ni gauche n’est pas une forme durable gouvernement, il se termine généralement en crises politiques.

Or, aujourd’hui, la France a besoin de choix clairs –ce dont elle a été privée en 2002 avec les conséquences négatives qui en ont découlé, François Bayrou parie sur le manque de mémoire des électeurs. C’est indéniablement faire preuve de démagogie. On avait connu un centre politique avec une identité nette, la démocratie chrétienne, que l’on pouvait approuver ou critiquer. Aujourd’hui, le centre que François Bayrou n’a plus un sens autre que tactique. Car il n’est pas « neutre » -contrairement à ce qu’il prétend- il est enraciné dans la droite, à la fois dans les faits et dans les idées.

I) François Bayrou : la droite dans les faits

François Bayrou a fait toute sa carrière à droite. Il a soutenu Valéry Giscard d’Estaing, il a fait partie de l’état major de Raymond Barre, il a été un allié d’Édouard Balladur et de Nicolas Sarkozy, il a été ministre de Jacques Chirac de 1993 à 1997. Refusant d’être un second rôle à l’UMP, il a décidé de jouer sa partie en 2002 avec l’UDF maintenue.

François Bayrou a voulu frapper l’opinion en demandant à son groupe parlementaire à voter de temps à autre avec le Parti Socialiste à partir de 2006. Mais sur l’ensemble de la législature, l’UDF, à l’Assemblée Nationale, et plus encore, au Sénat, a voté le plus souvent avec l’UMP. Sur 78 votes majeurs de 2002 à 2007, à 44 reprises pour des lois importantes, l’UDF a voté avec l’UMP, à 16 reprises avec le Parti Socialiste (surtout depuis 2006…). Il a déjà noter que dans ce cas, le groupe parlementaire UDF s’est divisé –François Bayrou étant incapable d’imposer la discipline à son petit groupe parlementaires !

François Bayrou mène un parti où tous les élus ont un électorat de droite, travaillent dans toutes les régions, les départements, les municipalités avec les élus UMP. La sociologie politique est quand même révélatrice d’une réalité ! D’ailleurs ses représentants ce sont unis ce mois-ci dès le premier tour à l’UMP lors d’une élection municipale partielle à Romainville (93).

II) François Bayrou : la droite dans les idées

Nous avons désormais la « chance » de disposer du programme économique et social –la « social-économie»- de François Bayrou. Si l’on passe sur des propositions purement démagogiques, un référendum sur les retraites !- l’essentiel permet de voir que ce programme est « UMP-compatible ».

Pouvoir d’achat : une pâle copie de Nicolas Sarkozy

Tout comme Nicolas Sarkozy, François Bayrou fait l’impasse sur la question du pouvoir d’achat :

  • - rien sur les salaires et le niveau des pensions des 14 millions de retraités, au risque de laisser une part non négligeable de notre population se paupériser, au détriment de la demande, seul moteur de la croissance encore allumé ;
  • - rien sur les prix, qu’il s’agisse des produits de consommation courante, du prix du  logement (120 euros de plus par mois pour louer depuis 2002 et 65% de hausse à l’achat) ou encore de l’énergie (+70% pour le fioul et 55% pour le gasoil depuis 2002) !

Tout comme Nicolas Sarkozy, les propositions de François Bayrou pour élever le niveau de vie se limitent à l’octroi aux entreprises de nouvelles exonérations de cotisations sociales portant sur les heures supplémentaires (dont le taux serait majoré de 35%). Cette proposition, qui s’apparente au « travailler plus pour gagner plus » de Nicolas Sarkozy, est  :

  • - un non sens juridique et économique : ce ne sont pas les salariés mais les employeurs qui décident seuls de recourir aux heures supplémentaires. lls le font s’ils l’estiment nécessaire aux besoins de l’entreprise : la proposition de François Bayrou se heurte à l’insuffisance de la demande et de l’activité économique ;
  • - une fin de recevoir sociale : la première valeur du travail, c’est son prix. Or, cette proposition exclue de facto les deux salariés sur trois qui n’ont tout simplement pas accès aux heures supplémentaires, ainsi que le million de salariés à temps partiel subi ( dont 80% de femmes) ;
  • - un nouveau cadeau fiscal consenti aux entreprises, et non des moindres : près de 2,8 milliards d’euros, sans la moindre obligation de la part de l’entreprise. Les effets d’aubaine seront conséquents, puisque aucune condition n’est fixée pour être éligible à l’allègement.

Emploi : une pâle copie des échecs du passé

Tout comme Nicolas Sarkozy, François Bayrou propose des exonérations de cotisations massives et indifférenciées. Ainsi, ses « deux emplois francs » de cotisations par entreprise seraient excessivement coûteux pour la collectivité et provoqueraient des effets d’aubaine massifs à l’avantage des entreprises, de loin les plus nombreuses, qui auraient embauché en l’absence de ces exonérations.
Cette mesure, qui priverait les caisses sociales de 4 milliards d’euros, représente un cadeau inédit par son ampleur mais aussi par la forme qu’il revêt : aucune limite n’étant fixée quant au niveau de qualification ou de salaire, il sera possible pour les entreprises d’utiliser ce dispositif pour défiscaliser les emplois les plus rémunérés.

Fiscalité : la fortune en héritage

Tout comme Nicolas Sarkozy, François Bayrou propose d’aggraver les réformes fiscales injustes de ces dernières années (qui ont placé la fiscalité française à l’avant dernier rang de l’OCDE en termes de progressivité) : il partage avec lui la même volonté d’abaisser fortement, jusqu’à les vider de leur contenu, l’impôt sur la fortune et l’impôt sur les successions, puisqu’il s’engage à exonérer de droits toutes les successions en ligne directe inférieures à 200.000 euros. Cette quasi suppression des « droits de donations et de successions pour tous les patrimoines petits et moyens » est une supercherie qui masque une mesure d’une injustice rarement atteinte : dans un pays où la succession moyenne est de 55.000 euros, ce dispositif a déjà exclu 80 % des patrimoines transmis en ligne directe de toute imposition. Cette proposition dédouanerait les Français les plus riches du paiement de cet impôt, puisque seul 25% des Français détiennent un capital supérieur à 260.000 euros[1]. Elle priverait le budget de l’État de près de 5 milliards d’euros par an, soit l’équivalent de 700 écoles ou encore 900 crèches. Clairement, au prétexte de favoriser les fruits du travail, François Bayrou favorisera l’héritage et la rente. 

« L’autre chemin » de François Bayrou mène simplement à droite !

[1] Source : Insee, Enquête revenus fiscaux de 2004

Note personnelle
A suivre

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A
certes ce personnage est inquiétant. Tenir un double langage en pleine campagne électorale, c'est à dire se postionner à gauche avec un discours où n'apparait jamais aucune proposition pour l'avenir et sortir un livre (payant...) où il présent eson programme très prononcé à droite, on peut se demander ce qu'il fera si jamais il est élu Président... Il ratisse aussi large que celui qui a contribué à sa création. Attention la chute risque d'etre rude, les desillusions aussi... Votez Bayrou, alors qu' il ne peut mathématiquement pas avoir de majorité à l'assemblée est une erreur ; sitot élu il retournera voir son "papa" Nicolas pour savoir ce qu'il doit faire... Certains à l'ump disent déja qu'il faut absolument passer des accords avec bayrou avant le premier tour.. C'est tres inquiétant en effet.
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J
Non je te rassure, il ne me fait pas peur, mais il est dangereux car  son programme ressemble à celui de Sarkozy, il fait parti de la majorité présidentielle, il a voté bon nombres de lois de cette législature, son programme sur l'immigration est le même que le TSar-Kozy, et ce n'est pas moi qui le dit il n'y à qu'a simplement regarder sur son site, et enfin pour terminer lui l'homme nouveau qui traine ses pantalons dans les différents ministères et à l'Assemblée Nationale depuis trente ans, on à pas le droit de prendre les électeurs pour des idiots avec de telles affirmations de sa part, lui qui veux privatiser l'école public.Piqure de rappel: 55% des Français ne savent pas pour qui, il vont voter, et les sondages donnant de plus en plus d'intentions de votes à Bayrou ne sont plus crédibles depuis longtemps (1995, 2002) alors le seul sondage qui m'intéresse c'est celui du premier et deuxième tour au soir. là on pourra mesurer les vrai chiffres.
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M
Bayrou vous inquiète de plus en plus......et c'est tout à fait normal.....
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J